POUR EVITER SALMONELLOSE ET COLIBACILLOSE,
PEUT-ON « BLANCHIR » LES PIGEONS ?
La salmonellose est généralement considérée comme une des maladies les plus redoutables pour le pigeon. Elle est en effet difficile à guérir, mais aussi à prévenir. Il existe largement plus d'une centaine de souches différentes de salmonelles qui peuvent provoquer cette maladie, avec d'une part des symptômes qui ne sont pas toujours identiques, et d'autre part des réponses variables aux médicaments utilisés. Même la vaccination est souvent inopérante, du fait de cette grande diversité des souches de salmonelles. Quant à l'autovaccin, sa préparation reste délicate, et il n'est possible de l'employer que lorsque la maladie est déclarée puisqu'il ne peut être élaboré au mieux en quelques jours, qu'à partir d'un sujet atteint. Cette perte de temps n'est évidemment pas négligeable, compte tenu de la gravité de l'affection.
LE MÉCANISME DE LA TRANSMISSION
On sait que la salmonellose ou paratyphose est due à un microbe présent dans l'intestin des pigeons où il ne cause aucun trouble. Contaminant les oeufs ou les jeunes dès le début du nourrissage, il cause des mortalités au nid, entre 10 et 15 jours, Passant occasionnellement dans l'organisme des adultes, il se localise à une articulation de l'aile ou de la patte, et cause de l'arthrite qui rend l'oiseau inapte au vol ou à la marche, et bien entendu aux concours et aux expositions.
On pourrait penser que les pigeons porteurs de cette salmonelle dans l'intestin sont immunisés contre elle, et que les jeunes sont protégés par les anticorps maternels transmis par l'oeuf. Or, ces anticorps n'existent pas, car la présence d'un microbe localisé à l'intestin, ne met pas en route les divers mécanismes de défense aboutissant à la production de ces substances de protection qui sont les anticorps. Dans ces conditions, aussi bien le jeune pigeonneau que l'adulte lui‑même, sont sans défense devant la passage de la salmonelle pathogène dans leur organisme.
On estime à environ 80% la proportion de pigeons qui sont porteurs de germes capables de causer la salmonellose, sans toutefois présenter de symptômes caractéristiques. Les sujets atteints en priorité par la maladie sont ceux que l'on a nouvellement introduits à l'élevage, ou encore les jeunes dont l'organisme n'a pas encore pu développer une résistance suffisante contre cette affection.
Mais c'est surtout au niveau de la reproduction que la salmonellose pose des problèmes souvent sérieux, avec la production d'oeufs inféconds, de la mortalité en coquilles ou peu après l'éclosion. Une forte proportion des pigeonneaux perdus au nid est due de toute manière à cette maladie, même si celle‑ci ne se manifeste pas de façon évidente chez les adultes.
LA VACCINATION
La vaccination, ou mieux l'autovaccination, permettent de provoquer la formation d'anticorps chez les reproducteurs. Ces anticorps les protègent et sont transmis aux jeunes par la femelle et par ses oeufs. Pourtant, ils n'empêchent pas ces reproducteurs de rester porteurs de salmonelles dans l'intestin, et donc de rester contagieux pour des pigeons indemnes qui, à leur contact, deviendront eux aussi porteurs de ces salmonelles dans l'intestin, avec tous les inconvénients qui en découlent. C'est la raison de l'opposition des milieux vétérinaires français à cette méthode de prévention. En effet, de tels oiseaux peuvent contaminer, non seulement leurs semblables, ce qui pourrait n'avoir que des conséquences limitées, mais aussi d'autres espèces poules, dindons, canards et à terme, arriver à poser un problème pour la santé humaine.
L'UTILISATION DES ANTIBIOTIQUES
Utiliser des antibiotiques à titre curatif contre la salmonellose, n'est pas nouveau. On a le plus souvent recours à des traitements brefs, et avec des antibiotiques pénétrant dans tout l'organisme : cette pénétration limitant la durée du traitement pour des raisons de toxicité. Or, si le traitement est court, des recontaminations sont possibles sinon probables, car les salmonelles survivent de 3 à 8 semaines (parfois plus) dans l'environnement : litière, matériel etc .
Il faut donc pouvoir faire un traitement prolongé, et par conséquent, inoffensif. Il existe des antibiotiques qui, donnés par voie digestive (dans l'aliment ou dans l'eau) ne sortent pas de l'intestin ; ils se concentrent dans le tube digestif, mais ne passent pas dans l'organisme ; de ce fait, utilisés ainsi, ils étaient censés ne pas être toxiques. Or, et pour diverses raisons, cette méthode reste délicate d'emploi, et de toute manière, les résultats se sont avérés très variables et souvent décevants à bien des points de vue.
LE RECOURS AUX FERMENTS LACTIQUES
Des essais de prévention ont été effectués, notamment au Canada, qui ont permis de doubler, et même davantage, la nombre de jeunes sevrés dans l'année. Cette méthode originale porte sur une large utilisation de ferments lactiques dont on attend en particulier qu'ils se substituent au moins partiellement aux salmonelles ainsi qu'aux colibacilles dans le tube digestif, ou en tout cas qu'ils freinent leur prolifération. Il s'agit là d'une théorie bien connue, mais en réalité, l'action de ces agents microbiens utiles est beaucoup plus complexe.
De nombreux facteurs sont susceptibles d'influencer les interactions qui existent d'une part entre les divers microorganismes de l'intestin, et d'autre part entre ces derniers et l'animal qui les héberge. Ce sont les effets cumulés de ces interactions qui déterminent la composition et par conséquent l'activité de la flore microbienne. A un équilibre optimal de celle‑ci correspond un état sanitaire satisfaisant. Il semble évident que, sous certaines conditions, des microorganismes et notamment les ferments lactiques, puissent contribuer à obtenir cet équilibre, et jouer ainsi un rôle prophylactique intéressant, de même qu'ils constituent une source d'enzymes indispensables au métabolisme de certains éléments nutritifs.
Dans le tube digestif, il existe deux sortes de flore microbienne, l'une qui peut être considérée comme inoffensive, l'autre qui est potentiellement pathogène. Le rôle principal de ces microorganismes est de participer à la digestion des aliments, qui ne peut se faire dans les meilleures conditions que si l'équilibre de la flore microbienne est maintenue en permanence. Or, il s'agit là d'une difficulté sérieuse, car les animaux sont constamment sujets à des agressions les plus diverses comme la surpopulation, le changement de nourriture, les modifications climatiques, les traitements, etc...
Il a été démontré que le bacille lactique qui est présent à l'état naturel dans l'intestin, est particulièrement sensible aux stress que peut subir son hôte. Il en résulte des diminutions importantes de la population de lactobacilles dans l'intestin, et par suite, un déséquilibre de la flore microbienne. Dans ces conditions, les bactéries pathogènes peuvent prendre le dessus, et créer des troubles plus ou moins sévères, qui vont de la mauvaise utilisation de la ration alimentaire, aux affections intestinales graves en passant par des diarrhées banales susceptibles d'ouvrir la voie à des maladies redoutables.
Un apport régulier de ferments lactiques destiné à augmenter dans le tube digestif: la population de microorganismes utiles, permet de maintenir ou éventuellement de rétablir l'équilibre au sein de la microflore.
L'UTILISATION DES ACIDES ORGANIQUES
Certains d'entre eux sont connus depuis longtemps pour contribuer à créer, à l'intérieur du tube digestif, un milieu inhospitalier pour certaines bactéries et même pour des parasites, susceptibles de provoquer des problèmes sanitaires graves.
Rejetés dans l'oubli par l'avènement des sulfamides et surtout des antibiotiques qui ont fini par être utilisés de façon abusive, ces acides organiques suscitent un regain d'intérêt certain, dicté à la fois par la raison mais aussi par la nécessité. D'une innocuité totale, ils peuvent être soit intégrés à la nourriture, soit administrés dans l'eau de boisson. Leur utilisation régulière, de préférence en alternance avec ferments et levures adéquats que l'on désigne de plus en plus souvent par le terme de probiotiques, permet de "blanchir" très correctement des oiseaux porteurs de germes pathogènes. Ceux‑ci sont en effet susceptibles de provoquer des affections graves comme la colibacillose et surtout comme la salmonellose, particulièrement redoutée des éleveurs de pigeons.
Pour être vraiment efficace, cette méthode de "blanchiment" doit cependant être appliquée de façon régulière pendant plusieurs semaines au moins, et de préférence pendant plusieurs mois. Les éleveurs ont tout intérêt à commencer à l'appliquer avant la période de reproduction, et à la poursuivre pendant toute la durée de celle‑ci. Le gros avantage de ce procédé, rappelons‑le, c'est qu'il ne prévoit que l'utilisation de produits naturels ou identiques, qui ne peuvent qu'être salutaires aux animaux, à l'exclusion de susbtances médicamenteuses dont on doit plus que jamais réserver l'usage ponctuel pour des cas bien particuliers, notamment pour le traitement curatif des maladies infectieuses graves.